Le dossier médical partagé (DMP) fait l'objet de critiques croissantes de la part des médecins libéraux. Qualifié de "vieillot" et peu ergonomique, cet outil censé centraliser les informations médicales des patients rencontre des difficultés majeures, majoritairement liées à son interface et à des défauts techniques. "On se sent souvent renvoyé dix ans en arrière avec un logiciel défaillant", déclare le docteur Thomas Maunoury, médecin généraliste dans le Nord. Comme il le souligne, même une simple connexion peut prendre jusqu'à 30 secondes.
La situation s'est envenimée avec l'adoption récente d'un projet de budget de la Sécurité sociale pour 2026. Ce texte impose des contraintes aux praticiens qui pourraient être pénalisés par des amendes pouvant atteindre 10.000 euros par an pour non-participation au DMP. Les obligations incluent le partage d'ordonnances et de documents médicaux, et l'obligation de consulter le DMP avant d'effectuer des actes coûteux ou à risque. Les syndicats, tels que la CSMF, jugent inacceptable d'imposer ces obligations sans fournir les outils adaptés.
Malgré ces tensions, la ministre de la Santé, Stéphanie Rist, a promis des améliorations. Selon elle, les efforts se concentrent sur la modernisation de l'outil pour le rendre plus accessible et complet, avec un objectif de réduction des sanctions à l'horizon 2028. "Nous avons le temps d’y travailler avec les professionnels", a-t-elle exprimé au Quotidien du Médecin.
En parallèle, la délégation au numérique en santé (DNS) assure que le programme de 2 milliards d'euros, financé par l'Union européenne, commence à porter ses fruits. 64.000 professionnels de santé, selon la DNS, ont déjà utilisé le DMP, et les données montrent que 70% des lettres de liaison produites à l'hôpital y sont désormais versées.
Les critiques persistent toutefois, le Dr Jean-Jacques Fraslin, médecin en Loire-Atlantique, évoquant un "fouillis énorme" dans les informations disponibles. Il propose même l'idée d'intégrer de l'intelligence artificielle pour faciliter la recherche de documents spécifiques dans le DMP.
Si des améliorations sont attendues d'ici 2026, la question demeure : les médecins accepteront-ils de s'adapter aux exigences croissantes sans des outils à la hauteur de leurs attentes ? La réponse pourrait bien influencer l'avenir du dossier médical partagé en France.







