Des centaines d'anciens soldats colombiens se sont aventurés au Soudan, attirés par la promesse de rémunérations faramineuses. Beaucoup d'entre eux ont perdu la vie dans une guerre civile brutale, caractérisée par des massacres, des viols et une famine dévastatrice. Au fil d'une enquête approfondie menée par l'AFP, le parcours de ces mercenaires a été retracé, révélant leur recrutement à travers les réseaux sociaux, leurs escales à Dubaï pour des formations sommaires, et les itinéraires complexes qu'ils ont empruntés pour rejoindre le Soudan.
Leur engagement s'est fait aux côtés des Forces de soutien rapide (FSR), une milice en guerre contre l'armée soudanaise depuis avril 2023, et accusée de nombreuses atrocités. L'enquête a mis en lumière un réseau orchestré par un colonel colombien à la retraite, actuellement sous sanctions américaines. Bien que les États-Unis n'aient pas nommé publiquement ces mercenaires, le soupçon pèse sur les Émirats arabes unis, accusés de soutenir discrètement les FSR.
Le voyage après recrutement commence souvent par un message sur WhatsApp, incitant d'anciens vétérans à se rendre à Dubaï. Une fois sur place, la réalité leur est souvent cachée : un déploiement imminent en Afrique pour des missions militaires. Un ancien soldat, qui a préféré rester anonyme, a rapporté avoir décliné l'offre après avoir été averti des dangers potentiels, tandis que d'autres ont saisi l'opportunité, espérant améliorer leur sort.
Des vidéos partagées sur les réseaux sociaux montrent ces mercenaires sur le terrain de guerre. L'un d'eux a filmé sa traversée dans des camps de déplacés, témoignant de la destruction. Cette réalité tragique a conduit à une augmentation alarmante du nombre de victimes, avec des experts estimant qu'au moins 80 Colombiens ont participé à la bataille autour d'El-Facher, dont plus de la moitié n'en sont pas revenus vivants.
Les motivations financières derrière ce phénomène sont puissantes, avec des salaires allant de 2 500 à 4 000 dollars par mois, soit jusqu'à six fois le montant des pensions militaires. Les opportunités qui se dressent pour des soldats retraités en Colombie, qui vivent souvent avec des pensions modestes, les poussent à risquer leurs vies dans des zones de conflit.
Les activités de recrutement sont orchestrées par un colonel italo-colombien, Alvaro Quijano, sanctionné par les États-Unis pour son rôle central dans cette affaire. Son entreprise, l'Académie pour la formation à la sécurité (A4SI), joue un rôle fondamental dans la mise en lien de ces vétérans avec des missions à l'étranger. Des révélations indiquent même que certains enfants ont été recrutés pour participer à ces opérations, attirés par des promesses de richesse.
La situation suscite une indignation croissante en Colombie et a conduit à l'adoption d'une nouvelle loi interdisant le recrutement de mercenaires. Cependant, pour plusieurs familles, il est déjà trop tard. De nombreux Colombiens perdent la vie dans ces engins de guerre, laissant derrière eux des proches en quête de justice et d'explications.
En conclusion, ce réseau de mercenaires révèle non seulement la complexité des conflits modernes, mais aussi l'impact dévastateur qu'ils ont sur des vies individuelles. Les familles colombiennes vivant le deuil de leurs proches se heurtent à une réalité amère, tandis que les enjeux géopolitiques continuent d'alimenter cette tragédie humaine.







